Noailles : La jeunesse

Cette aristocrate de la belle époque : La comtesse Anna- Élisabeth de Noailles, née Bibesco Bassaraba de Brancovan (1876-1933), française d’origine roumaine, une précieuse tenant salon, très entourée, très mondaine, très admirée s’est aussi révélée une très grande poétesse dont l’oeuvre témoigne d’un rapport quasi fusionnel à la Nature. Et comme elle dans son Offrande à la Nature il faut l’écrire avec un grand N quand la jeunesse lui est associée. Et comment ne pas aimer cette « Nature au cœur profond » et cette Jeunesse « joyeuse, ardente, printanière » ?

Tout le plaisir de vivre est tenu dans vos mains,
Ô Jeunesse joyeuse, ardente, printanière,
Autour de qui tournoie l’emportement humain
Comme une abeille autour d’une branche fruitière !

abeille.jpeg

Vous courez dans les champs, et le vol d’un pigeon
Fait plus d’ombre que vous sur l’herbe soleilleuse.
Vos yeux sont verdoyants, pareils à deux bourgeons,
Vos pieds ont la douceur des feuilles cotonneuses.

Vous habitez le tronc fécond des cerisiers
Qui reposent sur l’air leurs pesantes ramures,
Votre cœur est léger comme un panier d’osier
Plein de pétales vifs, de tiges et de mûres.

Cerisier

C’est par vous que l’air joue et que le matin rit,
Que l’eau laborieuse ou dolente s’éclaire,
Et que les cœurs sont comme un jardin qui fleurit
Avec ses amandiers et ses roses trémières!

C’est par vous que l’on est vivace et glorieux,
Que l’espoir est entier comme la lune ronde,
Et que la bonne odeur du jour d’été joyeux
Pénètre largement la poitrine profonde !

C’est par vous que l’on est incessamment mêlé
À la chaude, odorante et bruyante nature ;
Qu’on est fertile ainsi qu’un champ d’orge et de blé,
Beau comme le matin et comme la verdure.

ChampDeBlé

Ah! jeunesse, pourquoi faut-il que vous passiez
Et que nous demeurions pleins d’ennuis et pleins d’âge,
Comme un arbre qui vit sans lierre et sans rosier,
Qui souffre sur la route et ne fait plus d’ombrage…

Anna de Noailles (1876-1933)

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Et sur Thébaïde News – Théophraste :
« Rien de ce qui est humain ne m’est étranger. » Térence (190-159 av. J.-C.)

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